Et si les principes de la permaculture pouvaient guider les stratégies des entreprises ? C’est le pari de Norsys, société de services numériques, qui a inventé en 2020 la Permaentreprise, un modèle inspiré de la permaculture, pensé pour repenser en profondeur le rôle des organisations dans un monde instable.
Rencontre avec Thomas Breuzard, Dirigeant de Norsys, et Lola Virolle, Directrice de la transition écologique et sociale chez Makesense, pour comprendre comment ce modèle peut concrètement transformer les organisations.
De la terre à l’entreprise : s’inspirer du vivant pour un modèle plus durable
Issue du monde agricole, la permaculture est une méthode fondée sur l’observation des écosystèmes pour concevoir des organisations à la fois durables, autonomes et résilientes.
Transposée au monde économique, elle devient un outil puissant pour repenser les modèles d’entreprise confrontés à des défis sociaux et environnementaux croissants. Une approche innovante, testée sur le terrain, qui permet d’allier performance économique et responsabilité sociétale.
Comment ?
En reprenant les trois piliers éthiques de la permaculture : prendre soin des humains, préserver la planète et créer de la richesse en se fixant des limites responsables et sociales.
Concilier rentabilité et impact positif en s’engageant durablement
Comment maintenir pérenne son activité dans un contexte qui bouscule de nombreux acteurs économiques et secteurs d’activités ? Cette question, à la fois ambitieuse et lucide, est au cœur de la démarche de la Permaentreprise. Dans un monde devenu plus instable, penser l’évolution de son entreprise pour qu’elle relève les défis du 21ème siècle impose de revoir certains fondamentaux.
« On est passés d’un monde stable à un monde instable. L’optimisation ne suffit plus : il faut devenir robuste, voire résilient », affirme Lola Virolle. Le modèle de la Permaentreprise aide justement à construire les fondements de cette résilience, en s’appuyant sur une méthode d’auto-analyse des dépendances critiques (énergie, ressources, données, talents...) et en développant des plans d’action en cas de pénurie de certaines matières premières.
Loin d’être abstraite, cette logique s’appuie sur des ateliers de prospective, des diagnostics co-construits, et une réflexion très concrète sur le futur. « Ce qu’on cherche à faire émerger, ce sont des scénarios alternatifs pour tester d’autres façons de fonctionner. On accompagne les entreprises pour qu’elles identifient les points de fragilité de leur modèle économique, mais aussi des leviers d’innovation insoupçonnés », ajoute Lola Virolle.
Ce modèle propose une grille de lecture applicable à tous types d’organisations, quels que soient leur taille ou leur secteur, et permet à chacun d’agir à son échelle, de manière progressive et systémique. « C’est le meilleur outil que j’ai trouvé à ce jour pour permettre à une entreprise d’opérer une transformation progressive vers un modèle qui contribue à la résolution des enjeux sociétaux, tout en gagnant en résilience », complète Thomas Breuzard.
Pour Norsys, il est très simple de penser façon Permaentreprise. « On commence par une question simple : de quoi mon activité dépend-elle pour fonctionner au quotidien ? Et ensuite : que se passe-t-il si cette ressource disparaît ou devient inaccessible ? » Pour y répondre, certaines organisations, ont par exemple doublé leur alimentation électrique pour garantir leur production en cas de panne majeure.
D’autres revoient leurs dépendances à certaines matières premières. « L’enjeu, ce n’est pas de tout révolutionner en une fois, mais d’ouvrir des marges de manœuvre nouvelles dans un monde incertain », souligne Thomas Breuzard. « Une bonne illustration serait une entreprise qui produit du papier. Dans une logique de sobriété, elle pourrait recourir davantage aux papiers recyclés.
Mais dans une visée régénérative, propre à ce modèle, elle ira plus loin en investissant directement dans la gestion durable de forêts, afin de restaurer les écosystèmes qu’elle mobilise. » La permaentreprise offre donc un cap stratégique vers demain.
Agir à court terme, penser le long terme
Ce travail de lucidité sur ses problématiques débouche sur des plans B concrets, mais aussi sur des réflexions plus profondes relatives au modèle économique de l’entreprise lui-même. C’est souvent dans cette dynamique que naissent de nouvelles offres plus sobres, plus locales, ou plus alignées avec les enjeux sociétaux, représentant parfois jusqu’à 15% du chiffre d’affaires. En parallèle, certaines entreprises choisissent de renoncer à des produits incompatibles avec les limites planétaires.
Dans un contexte où 88% des entreprises souhaitent opérer un changement de modèle, mais où seulement 26% des PME ont structuré une démarche RSE, le modèle Permaentreprise apporte un cadre clair et opérationnel pour transformer l’intention en stratégie. Un cadre parfait pour s’aligner sur les dispositifs proposés par Atlas, notamment en matière de PCRH ou d’accompagnement au développement durable.
« Fixer des limites, ce n’est pas renoncer au profit. C’est simplement remettre ce profit au service de ce qui compte » rappelle Thomas Breuzard. Une posture qui a permis à Norsys de développer sa marque employeur, de diviser son turnover par trois et de maintenir un taux d’absentéisme de moins de 3 jours par an, contre 15 en moyenne nationale. Le choix de transformation est aussi un pari sur la performance puisque les entreprises qui disposent d’une stratégie RSE voient leur performance économique progresser en moyenne de +13% (source : France Stratégie).
Un engagement qui est donc porteur de sens... et de résultats !